mardi 28 juin 2011

Ça marche !

Enfin, nous voilà repartis… Après deux semaines d’immobilisation, le camping-car est enfin réparé et nous avons repris la route illico car, comme nous le disions dans le précédent article, ça commence à être juste : nous avons 7000km à faire en 19 jours pour arriver en temps et en heure à New York – autant dire qu’on a eu raison de faire cette petite parenthèse en Californie parce qu’on ne va pas pouvoir y retourner ! Nous sommes malgré tout partis vers Guadalajara, c’est à dire vers le Nord Est de Mexico, de manière à passer en Basse-Californie pour remonter jusqu’à Tijuana et entrer aux Etats Unis par San Diego et filer vers Las Vegas – en effet, même si le détour est très important, tout le monde nous déconseille de passer par le route directe qui coupe le Nord du Mexique, soit par Monterrey (pas terrible), soit par Ciudad Juarez (encore moins terrible), les narcos sont trop actifs par là bas…

Il y a donc maintenant deux bonnes semaines, nous attendions que le soit-disant expert des turbos mandaté par Ford finisse sa réparation pour repartir – mais patatras, la réparation n’a rien donné. Nous avions donc parié sur la réparation et perdu le pari : verdict imparable, il fallait commander un turbo en Europe, 8 jours de délais. Nous n’hésitons pas une seconde : le temps court trop vite, et nous ne voulons pas passer une autre semaine à Mexico malgré l’accueil de Cristina et Wojtek. La magie d’internet et des low-cost nous permet de trouver des billets bon marché pour San Francisco, retour par Los Angeles. Billets pris à 23h le lundi, départ à 13h le mardi, c’est du vite fait – le temps de faire une petite valise (une valise pour 5, les douaniers ont du mal à nous croire !) et nous sautons dans l’avion.
Arrivée à San Francisco mardi dernier 14 juin : le choc culturel après 6 mois d’Amérique Latine est très amusant ! Les enfants sont épatés, la ville est magnifique, les points de vue imparables. Après une première nuit tranquille nous partons à la découverte des différents quartiers, Chinatown en particulier où nous visitons un temple bouddhiste – après tout ce baroque latino, c’est rigolo, et très beau aussi. Nous avons l’impression de passer à chaque instant d’un coin de la planète à un autre, entre les playgrounds remplis de petits asiatiques, les restaus italiens où les serveurs parlent napolitain, les allumés trash qui se baladent dans les rues avec un look très étudié (ils sont finalement très conventionnels dans leur rébellion !), les clochards blacks hilares quand on leur donne une pièce et les chauffeurs de taxi, tous latinos. Nous avons de la chance avec le temps, pas de brume cette semaine, grand soleil sur le Golden Gate que nous traversons à pied, mais il fait quand même très froid – comme disait Mark Twain : « l’hiver le plus froid que j’ai jamais passé, c’est un été à San Francisco » ! Deuxième journée à San Francisco, entre musées et shopping, puis retour à l’hôtel. Nous avons adoré la ville, magnifiquement située et construite, mais clairement, avec trois enfants, on ne se sent pas les bienvenus – c’est une ville bobo pour DINKs, les fameux « Double Income No Kids ». Marthe trouve que la caissière de chez Gap « a une voix de grosse fumeuse » et il faut que je lui explique que c’est plutôt « un gros fumeur »...

Nous partons donc le vendredi matin pour le parc de Yosemite, dans une voiture de location (quel silence après le camping car !) – après une bataille pour trouver une chambre d’hôtel, nous faisons un tour dans le parc au coucher du soleil – cela nous rappelle le Torres del Paine chilien, même montagnes de granit. Le lendemain, samedi, balades dans le parc : à pied d’abord, dans les hauteurs, au milieu de la neige – nous devons franchir des ruisseaux pieds nus – au début, ça rafraichit, ensuite c’est froid, et finalement ça fait mal ! Les caisses en métal blindé pour empêcher les ours de sauter sur la nourriture et d’ouvrir les voitures comme des boîtes de conserve ne sont qu’à moitié rassurantes – après 6 hamburgers en 3 jours, le pique nique est bienvenu, et nous redescendons avec l’intention de louer des vélos dans la vallée… Mauvaise idée : un samedi de printemps, c’est la foule totale : nous resterons 3h dans les embouteillages, les enfants marchant à côté de la voiture, en plein parc – il faudrait que les rangers régulent mieux les flux… mais l’année est exceptionnelle pour la neige, aussi les cascades abondent, notamment la fameuse Yosemite Falls, 730m de haut quand même !

Nous avons finalement loué une maison pour le week end, à quelques kilomètres du parc, sur un golf : nous dînons donc au club-house, un peu hallucinés de ce mélange d’esprit bon-enfant (tout le monde est adorable) et de ringardise absolue (le groupe qui joue du blues-rock est impayable !).
Le lendemain, dimanche 19 donc, départ pour Sequoia Park : jolie route, et grande balade à pied au milieu des Sequoias géants, tout seuls cette fois. Tellement seuls d’ailleurs que nous récupérons un petit garçon américain de 7 ans, perdu au milieu de la forêt, un peu impressionnés par ces géants (sans compter qu’ici aussi, il y a les boîtes à ours !). Sur la route du parc, nous avons droit à une vraie scène de film américain : une voiture de rangers, gyrophares et appels de phares – on s’arrête, il ne faut pas descendre, garder les mains sur le volant, rester calme – le monsieur, fort aimable, m’explique que sur le dernier mile, j’ai dû couper 20 fois la ligne jaune continue, et que c’est mal ! Il s’assure que je n’ai rien bu, et je lui explique qu’il s’agit seulement d’éviter les courbes pour que les enfants ne soient pas malades – on en sera quitte pour un avertissement, ouf !

Pour gagner un peu de temps, et puisque nous sommes aux Etats Unis, sans risque donc, nous décidons de rouler jusqu’à Los Angeles pour pouvoir profiter de nos derniers jours à fond – réservation d’hôtel grâce au Lonely Planet par téléphone, nous pensons arriver dans le même genre de motel que nous avions à San Francisco. La surprise est de taille : c’est un vieux palace, avec un hall d’entrée digne de Grand Central – les enfants sont ébahis ! Le prix d’appel était intéressant, mais 80$ le petit déjeuner, ça fait cher du capuccino !

Deux jours à Los Angeles donc, dont le premier est consacré aux Studios Universal – nous nous amusons bien, surtout dans la balade au milieu des vrais studios (une petite larme en traversant la place du City Hall de « Retour vers le futur », un frisson en voyant le décor de crash d’avion qui a servi pour « La Guerre des Mondes ») – le lendemain, promenade sur Hollywood Boulevard, photos obligée devant les empreintes de Jack Sparrow, alias Johnny Depp (il faut dire que nous avons été voir Pirates des Caraïbes 4 à Mexico dans une salle dingue, où les sièges en cuir sont plus larges qu’une place Business chez Air France, et où on nous a servi le diner pendant la séance – pas facile de manger des sushis avec des baguettes dans le noir avec des lunettes 3D sur le nez, surtout à 7 ans !). Nous terminons notre séjour californien par une visite du Getty Museum – la collection est très belle, mais c’est surtout le musée lui même, qui nous fascine, magnifique œuvre architecturale perchée sur une colline en pleine ville, au milieu de jardins insensés – comme disait Getty lui même : « c’est facile de faire fortune : levez vous tôt, travaillez dur, et trouvez du pétrole ! ».

Le lendemain, retour à Mexico où une bonne surprise nous attend – le camping car est prêt, et fonctionne ! Jeanne trouve qu’au Mexique, on retrouve de la liberté ! Les autres aimaient bien les Etats Unis car « on pouvait jeter le papier dans les cabinets et pas dans la poubelle d’à côté comme au Mexique » !!! Nous sommes donc repartis jeudi matin de Mexico et nous traçons jusqu’à la frontière – 1900 km en 2 jours, ça a été long mais nous sommes déjà en Basse Californie et espérons passer la frontière mardi pour atteindre Las Vegas dans la journée ! On a passé la Basse Californie à toute vitesse, avec regrets d'ailleurs car la région est vraiment très belle : on alterne entre la côte Pacifique, froide et ventée, et la côte de la mer de Cortès, idyllique avec ses baies turquoises où l'on voyait nager dans une eau à 30°C dauphins et poissons de toutes sortes, sans oublier les déserts de l'intérieur, où alternent plaines, volcans et montagnes, le tout au milieu de forêts de cactus à perte de vue...

Dernière minute : ça y est ! nous sommes passés aux Etats Unis, par Tijuana – le passage de frontière a été étonnamment facile, il a juste fallu qu’on laisse deux mangues et trois patates… Comme on s’était trompé de file, on est passé avec les frontaliers, c’est évidemment plus simple ! Pas facile en revanche de laisser le Mexique, pays merveilleux, en sachant que c’est bientôt la fin de la balade ! Après une nuit à San Diego et une visite du fameux zoo (bof, bof...), nous voilà effectivement à Las Vegas - Joseph est tout guilleret au milieu des néons, des casinos et des hôtels délirants - "on va s'éclater" nous a-t-il dit en arrivant.Mieux vaut ne pas rester trop longtemps, ou il sera définitivement perdu...

lundi 13 juin 2011

Ca commence à être un peu juste…

Après la pompe à huile et la vanne EGR, c’est le tour du turbo de faire des siennes… une espèce de Zzzzzzzz de très mauvais augure qui nous coince à Mexico depuis déjà une semaine : on essaie de réparer car il faudrait un temps fou pour faire venir la pièce depuis la France. En effet, mystère des constructeurs automobiles, le Ford Transit est construit quelque part en Europe pour le monde entier, mais entre le modèle américain et le modèle européen, les ingénieurs se sont amusés à tout changer ! Pas de pièce de rechange idoine sur le continent américain donc… Les mexicains sont charmants et serviables au possible, mais fidèles à leur réputation : tout est toujours presque prêt, et puis ensuite on vous explique « lo que hay es que… mi tia se muriò » - la vieille tante a bon dos pour expliquer n’importe quel retard. Conséquence donc : depuis une semaine, et contrairement à nos plans, nous sommes coincés à Mexico. Heureusement, Anaïs, Andrès et ses parents sont toujours aux petits soins pour nous : nous sommes logés (pas très glamour de dormir dans le garage Ford) et ils nous prêtent une voiture, ce qui nous permet quelques balades en ville.

Mais comment en sommes nous arrivés là depuis notre lointain séjour à San Cristobal de las casas, en plein Chiapas ? Nous avons commencé comme prévu par un week end extraordinaire sur la côte pacifique, à Punta Zicatela, près de Puerto Escondido, où nous sommes accueillis dans la très jolie maison de vacances des parents d’Andrès – week end farniente à regarder la mer se fracasser sur la plage en énormes rouleaux, à se prélasser au bord de la piscine, à écraser quelques tarentules (beurk), à ramasser des crabes perdus dans la piscine et à fêter l’anniversaire de Joseph. Il aura d’ailleurs le plus beau cadeau d’anniversaire qui soit : alors que nous regardons la mer, Eléonore aperçoit un sillage blanc très rapide – le temps de lever les yeux, nous voyons un orque sauter, se retourner et retomber sur le dos dans une grande gerbe d’écume – waouh !
Transfert de tortues
La veille, nous étions passés à Mazunte, petit village vaguement hippie mais surtout très intéressé par l’argent des touristes, pour visiter un centre d’étude consacré aux tortues marines. Moment génial, une laborantine propose aux enfants de l’aider à transvaser des bébés tortues d’un bassin à un autre – tout le monde prend son bébé tortue dans la main, on se prend pour Greenpeace et c’est magique.

Nous avons beaucoup de mal à quitter Punta Zicatela, petit coin de paradis terrestre, mais nous décidons de suivre notre chemin, comme prévu, vers Oaxaca, ville coloniale au sud de Mexico. Comme en Colombie, la route est étroite et tournicote, mais on était prévenu et on a prévu la journée. Bien nous en a pris… En effet, à mi-chemin, et après 254 « topes », les fameux gendarmes couchés mexicains qui sont plutôt Sergent Garcia que Don Quijote pour le profil, nous nous heurtons à un barrage : les habitants d’un village indigène du coin ont coupé la route principale de l’Etat de Oaxaca pour manifester contre leur maire qui semble-t-il pique largement dans la caisse. On a assez envie de les croire, quand on voit que le village où nous sommes arrêtés, pourtant à un carrefour important, n’a pas de réseau cellulaire… Bref, les autres voyageurs bloqués semblent aussi compatissants et personne ne s’énerve, alors que l’attente durera quand même 6 heures ! Nous finissons la route pour Oaxaca de nuit, en convoi, pour terminer dans une station-service : il est trop tard pour chercher le camping.

Atelier d'alebrijes
A Oaxaca, première étape chez Ford pendant qu’Eléonore et les enfants essaient de visiter la ville – mais là aussi il y a un conflit social, et tout le centre historique est sous des bâches depuis plusieurs jours – cette fois ce sont les profs qui manifestent, et les habitants sont beaucoup moins compatissants ! Il semble en effet que la patronne du syndicat soit devenue une des femmes les plus riches du pays… Je me crois revenu en Argentine ! On ne verra donc pas grand chose de Oaxaca, puisqu’il faut marcher courbé en deux pour passer. Mais les villages des environs regorgent de richesses : Monte Alban, magnifique site zapotèque qui domine toutes les vallées des alentours,  San Bartolo et ses poteries noires, San Martin et ses « alebrijes », animaux fantastiques sculptés et peints de mille couleurs… on en profite !

L’arrêt chez Ford était nécessaire pour diverses raisons, mais nos amis ne peuvent pas réparer le turbo – pas grave se dit on, on le fera à Mexico… Et on repart donc pour Puebla, dernière étape avant de boucler la boucle du sud mexicain – quelques heures d’arrêt, le temps d’une balade, d’un musée somptueux (les enfants sont même contents de retrouver des objets pré-hispaniques après tant d’art colonial !) et d’une tentative gastronomique autour du « mole », étonnante sauce locale à base de chocolat et de multiples épices.

Nous revenons donc à Mexico, déposons le camping car dans un estacionamiento et retrouvons Anaïs et Andrès qui nous emmènent passer le week end à Valle de Bravo, le Côme local : l’ambiance est en effet très « lac italien », y compris la balade en Motorcraft, le Riva mexicain. C’est bien agréable, d’autant que nous faisons aussi connaissance d’amis à eux, architectes également, qui viennent de se faire construire une maison tout en béton et verre, dominant le lac, avec jardin potager sur le toit ! Nous fêtons aussi la fin du CNED ! Les enfants ont fait leur année scolaire en 6 mois, et nous venons de recevoir les avis de passage - Ouf !!!

Au musée !
De retour à Mexico, entre deux visites chez Ford, nous en profitons pour faire quelques balades, notamment au Chateau de Chapultepec, la demeure de l'empereur Maximilien,  envoyé puis sacrifié par Napoléon III, et surtout au musée d'art populaire et à sa fabuleuse boutique d'artisanat ! On croise là bas toute la créativité des mexicains (poteries, verre, sculptures, ex votos, fer blanc martelé, tissus...) et leur génial sens de l'humour décalé autour de la mort : au Mexique, tous les personnages, toutes les scènes importantes, sont mises en scène avec des squelettes à mourir de rire - on adore ! On repasse voir aussi la maman d'Andrès dans sa maison d'édition où les enfants se plongent dans les livres qu'elle édite, pour son grand bonheur. De retour le soir dans la maison où nous sommes logés, Joseph organise de grandes parties de "pinatas" avec les enfants de Mary et Bellie qui travaillent pour la famille : on remplit des figures de papier de bonbons, on les accroche, on tape sur tout cela avec un bâton en chantant une chanson, jusqu'à explosion de la figure et la chute des bonbons !

Comme je le disais plus haut, nous passons donc la semaine à attendre la réparation du turbo, et vendredi (le 10 juin), ça y est, nous repartons, heureux de reprendre la route. Mais patatras, après 2km, nous faisons demi-tour : le moteur fait plus de bruit qu’avant…  Alors que samedi matin il est évident que le week end ne suffira pas, nous décidons de partir voir les villes coloniales du Nord : quitte à être en retard, autant en profiter ! Nous venons donc de passer deux jours à San Miguel de Allende et Guanajuato (il faut entendre le GPS prononcer ces noms avec un impayable accent français), bijoux coloniaux. San Miguel est aux mains des américains en villégiature, très beau, mais un peu trop figé alors que Guanajuato déborde de fantaisie et d’énergie, avec ses mariachis à tous les coins de rue (il faut avoir entendu le mélange de My Way et de Guantenamera, les deux à la trompette, sur la place de la ville !) - Guanajuato est aussi une ancienne ville minière, sorte de Potosi mexicain, et est percée de mille tunnels désormais routiers, un vrai dédale dans lequel on se perd complètement, c'est assez amusant (jusqu'à un certain point !). Entre San Miguel et Guanajuato, nous prenons aussi le temps de nous arrêter au Sanctuario de Atotonilco où, dimanche oblige, un véritable marché de bondieuseries se tient pour les pélerins, tous mexicains : au programme, ceintures de discipline en crin et couronne d'épines ! On se croirait revenu au temps de l'Inquisition... Une petite dame demande même à Eléonore de la "parrainer" en lui achetant une ceinture de crin pour qu'elle puisse entrer dans le sanctuaire !

Demain, verdict sur le camping car, et nous espérons reprendre la route pour attraper le ferry qui nous emmènera en Basse Californie jeudi, avec 10 jours de retard sur un planning qui a déjà un mois de décalage ! Il va falloir faire des choix aux Etats Unis : ça commence à être un peu juste…

Dernière minute : décision draconnienne - il faut réellement changer le turbo, la réparation ne marchera pas. Ford fait donc venir une pièce de France, il y en a pour 8 jours. Notre timing est trop serré : nous décidons donc de partir faire un aller-retour en Californie que nous n'aurons sinon pas le temps de visiter. Retour prévu dans une semaine pour reprendre la longue route vers New York.