vendredi 22 juillet 2011

Tous les visages de l’Amérique


Nous avons donc laissé le blog à notre arrivée à New York il y a une bonne semaine.

Après une nuit passée chez Jim, le frère de Mike, à ranger le camping car, nous partons pour Manhattan où nous nous installons avant de filer à JFK chercher Martine, Roger et Domitille. A peine remis du décalage horaire, nous partons à l'assaut des trottoirs encombrés et pleins de surprises. D'abord il y a la foule, dense comme nulle part ailleurs à part peut être à La Paz. Nous retrouvons une forme de latinité au milieu des gratte-ciels : les gens traversent n'importe où, les rues sont assez sales et il y a beaucoup plus de homeless et surtout de gens paumés et détruits par la drogue qu'ailleurs.

Nous voila donc partis pour un pique-nique jazzy à Washington Square puis une balade à travers Greenwich Village, Soho et l'East Village - pas de tours autour de nous, seulement ces petites maisons en briques avec leurs perrons, c'est magnifique et aussi amusant car on se croirait dans un Woody Allen. Nous terminons notre après midi sur la High Line, très jolie promenade aménagée le long de l’Hudson River sur une ancienne voie ferrée, comme la coulée verte à Paris. Une différence notable cependant : il y a du mobilier de jardin à disposition, et Jeudi 14 nous commençons le tour des musées par le Guggenheim dont l'intérêt est encore plus dans le bâtiment que dans la collection. Apres le musée, pique-nique à Central Park, Martine mange son premier Hot Dog moutarde ketchup, les enfants rigolent du spectacle !

Vendredi, après une bonne balade sur le pont de Brooklyn, dans le sud de Manhattan et une émouvante visite à Ground Zero, nous espérons profiter de la gratuité du MOMA en fin d’après midi, mais la queue fait le tour du « block », c’est donc partie remise pour le samedi matin. Nous commençons par une expo de Francis Alÿs, grand vidéaste contemporain, que nous avons découvert au Pérou grâce à Laurens, un jeune Belge qui fait une thèse sur lui. La collection est dingue, le musée fatigant et nous terminons par un petit repos dans le jardin des sculptures, au milieu des Maillol, Henry Moore, Rodin, Matisse, Giacometti, sans oublier une ridicule installation de Yoko Ono (un ficus sur lequel on peut accrocher des étiquettes après y avoir inscrit un vœu personnel) qui n’a rien à faire au milieu de ces chefs d’œuvre – il semble que ce soit juste une généreuse donatrice du musée… Nos journées sont épuisantes mais très riches – et il fait de plus en plus chaud (on atteint les 100°F aujourd’hui…).

Dimanche, après avoir retrouvé avec joie Constance, la marraine de Joseph, et sa fille Céleste, c’est l’occasion d’aller à un service baptiste à Harlem pour écouter les Gospel – là aussi, la queue est immense, nous nous rabattons donc sur une autre église où le show est complet et un peu forcé : une fille entre en transe en se trémoussant, le pasteur harangue la foule pour augmenter les dons des fidèles (l’église s’appelle d’ailleurs Grand Refuge Church, Inc. – rien à voir avec une organisation à but non lucratif !) mais il y a quand même une belle ferveur. Et puis Roger qui se promenait en regardant le ciel bute sur une grille et tombe sur les bras. La douleur augmente avec la journée et nous décidons finalement de partir à l’hôpital du quartier après le dîner : bilan, une petite fêlure au radius, qui nécessite quelques précautions mais pas de plâtre heureusement. C’est donc l’occasion d’expérimenter le fameux système de santé américain, et nous sommes très surpris : la qualité du service est évidemment très bonne, le personnel charmant et professionnel alors qu’il est minuit un dimanche soir, mais surtout les soins seront gratuits, y compris la radio – l’hôpital, pourtant privé, adhère au programme Medicaid d’Obama et chacun a droit gratuitement à un diagnostic incluant les radios et à un traitement de stabilisation – c’est ce dont nous avions besoin. En revanche, pour voir un médecin et faire traduire une ordonnance pour les antihistaminiques d’Eléonore, il aurait fallu débourser 180$ !

Les journées continuent  à se succéder à un rythme effréné : lundi, après la désormais traditionnelle leçon de latin avec Marthe, nous nous promenons à Little Italy et Chinatown avant un diner réjouissant avec Jean-Philippe Delhomme, l’ami des Martine et Roger grâce auquel nous avons trouvé l’appartement. Mardi, je dois encore retourner dans le Queens m’occuper des papiers  du camping-car avant de retrouver toute la famille qui sort du Met et de l’exposition sublime de Alexander Mc Queen. Les deux grandes, Marthe et Domitille, ont le droit de se promener ensuite toutes seules dans Manhattan, c’est la folle liberté, elles filent bien sûr chez Abercrombie avant de rentrer en métro. Après 2 ans de prison dorée à Buenos Aires, c’est la joie. Jeanne part retrouver sa copine Antonia qui l’emmène voir le Roi Lion à Broadway ! Pendant ce temps, nouveau dîner, nous recevons Jim qui nous a accueilli et qui a hébergé le camping car, que je laisse d’ailleurs le lendemain au Port de Newark – c’est amusant de voir le côté « working class » des Etats Unis, au delà du glamour de Manhattan. Au port, les camionneurs sont tatoués, gros bras, barbus et prennent leur déjeuner dans la caravane du vendeur de hot dogs arménien qui branle à l’entrée de la zone industrielle… Finalement, le cinéma continue !

Mercredi après-midi, Hilary, la maman d’Antonia, nous emmène visiter le Museum d’Histoire Naturelle, très proche de son équivalent parisien, mais avec un planétarium qui expose des photos du sol lunaire, on s’y croirait, c’est très émouvant – Joseph s’enthousiasme d’ailleurs devant une pierre de lune. Après une petite visite à Kate Lehmann, la voisin de la rue du Bac, dans son très joli atelier du Lower West Side, nous ramenons la ribambelle à la maison avant de ressortir pour une soirée entre adultes au Village Vanguard, LE club de jazz où tous les plus grands ont enregistré un album Live : on coche les cases !

Jeudi, journée épuisante sous une chaleur humide qui nous essore, à la statue de la liberté, avec Constance et Céleste, avec hommage à l’arrière grand-père de Constance, ambassadeur de France aux Etats Unis qui a commandé la statue : photo obligatoire devant le buste ! Paradoxalement, c’est à la statue de la Liberté que les contrôles de sécurité sont les pires, comme dans les aéroports, mais la symbolique reste très forte : cette statue offerte par la France mais qui défie le vieux monde  accueillait les immigrants arrivant à Ellis Island il y a un siècle. Nous visitons d’ailleurs ensuite le musée de l’immigration, très émouvant car on imagine le sort de tous ces pauvres hères des troisièmes classes (les plus riches avaient un traitement de faveur). Retour à la maison pour une petite sieste avant de repartir pour Broadway : nous allons tous ensemble voir Mamma Mia – bonne surprise, nous avons des loges, on se croirait à l’opéra au XIXème siècle ! Les quatre filles, Domitille, Céleste, Marthe et Jeanne, ont leur propre loge où elles dansent pendant tout le spectacle. Martine et Roger découvrent Broadway et Mamma mia, ils sont ébahis par l’énergie, les costumes… Nous terminons la soirée par un autre mythe, Times Square, de nuit, au milieu des néons et des écrans géants. Les enfants auront même droit à leur quart d’heure de gloire : un magasin propose de se faire prendre en photo avant d’afficher la photo pendant 15s sur le plus grand écran de Times Square, 15m par 10 au moins – c’est le délire !

jeudi 14 juillet 2011

New York, New York…


Cette fois, nous y sommes ! Au bout de sept tout petits mois de voyage, nous sommes donc entrés aux USA par la fameuse frontière de Tijuana – après quelques minutes de stress (les indications sont limitées et les candidats au passage nombreux, qui s’accrochent au camping-car soit disant pour nous montrer le chemin…), nous sommes passés comme des fleurs, grâce à une erreur d’aiguillage stratégique : nous étions dans la file des frontaliers, impossible d’en sortir, nous avons donc bénéficié du même traitement – comme nos passeports étaient déjà tamponnés depuis la virée californienne, et qu’il n’y a aucune procédure pour l’importation de véhicules (incroyable d’ailleurs), la frontière nous a pris un quart d’heure.

Du coup, et d’un coup, nous changeons de monde en l’espace de 200 mètres, et c’est frappant et presqu’angoissant : le mur qui sépare les deux pays rappelle vraiment le mur de Berlin, l’entassement, la fumée, le bruit, la foule d’un côté, les cottages, les terrains de golf et l’opulence de l’autre. C’est un bref résumé du monde qui nous saute aux yeux, et comme nous nous le disons depuis le début du voyage, nous avons de la chance « d’être nés du bon côté de la rivière ».

Première nuit à San Diego donc – on nous avait prévenus : aux Etats Unis, on ne dort pas dans la rue, et nous ne tentons pas le diable donc. Direction : le premier RV Park venu, où nous découvrons, sidérés, que les américains sont les rois du camping-car (on en croisera des millions sur les routes), et du gigantisme. Elliot fait figure de nain à côté des bus aménagés, qui s’ouvrent sur les côtés pour créer plus d’espace à l’intérieur et où les écrans géants sont branchés sur le câble. On fête notre entrée aux Etats Unis par un petit restau, le premier d’une longue liste de déconvenues ! Ils savent faire plein de choses, mais vraiment pas la cuisine…

Le lendemain, nous passons par le très fameux zoo de San Diego, un peu décevant, à part la piscine géante où un ours blanc joue au water polo, puis nous prenons la route pour Las Vegas. Le turbo tient, malgré une petite fuite d’huile, et nous arrivons à la nuit tombée au Circus Circus, le seul complexe hôtelier du coin avec RV Park – nous irons d’ailleurs à l’hôtel, ça coûte moins cher qu’un emplacement de camping ! Nous ne resterons que 24h à Las Vegas, nous sommes tous effrayés par la ville, son côté sordide : on s’attendait à un grand délire mais tout cela se prend terriblement au sérieux – le comble est  quand même la promenade en gondole sur un grand canal  de pacotille sous un ciel en carton pâte, dans une galerie commerçante climatisée, avec un gondolier qui chante Ô Sole Mio ! Le tapis roulant sur le pont des soupirs avec la tour Eiffel en arrière plan n’était pas mal non plus…
Aaah, Venise !

Nous faisons donc rapidement route vers l’Est pour visiter quelques parcs avant de retrouver Mike et Trish. Et cette fois, la magie opère vraiment : arrivée au Grand Canyon pour le coucher du soleil (le gardien du RV Park ouvre des yeux comme des soucoupes quand on lui demande s’il lui reste un emplacement : « vous n’avez pas réservé ??? »), nuit au calme sur un parking (comme quoi, c’est possible même aux Etats Unis) et puis promenade le long de Desert View le lendemain matin – absolument magique, on a beau l’avoir vu cent fois en photo, c’est sidérant. Nous croisons aussi un immense cerf, un elk en réalité, que Jeanne identifie immédiatement comme le Dieu cerf de Princesse Mononoké, son film fétiche. La journée sera vraiment riche car nous poursuivons jusqu’à Monument Valley, où nous arrivons aussi pour le coucher du soleil – c’est encore plus scotchant que la veille car la lumière rasante  embrase les roches rouges, waouh… On se réveille à 5h pour voir le lever du soleil et puis départ pour une excursion sur le site : on a finalement choisi cette solution pour épargner un peu les pneus et les amortisseurs d’Elliot, pour éviter de casser l’artisanat mexicain sur les cahots, et parce que les guides peuvent nous emmener là où on ne pourrait clairement pas aller. On a eu raison : le guide navajo nous emmène voir des arches gigantesques où le son de sa flûte résonne, des peintures rupestres de ses ancêtres, et nous montre les petites maisons en terre où il a grandi avec ses grands-mères. C’est sympathique car il est à la fois très moderne (lunettes chic, i-Pod et compagnie) et emprunt de ses traditions : il nous parle avec bonheur de son enfance (il n’a pas 30 ans), lorsqu’il dormait entre deux peaux de mouton et où il devait faire 3 miles à pied pour aller chercher de l’eau. Monument valley restera un grand moment d’émotions pour toute la famille.
Ensuite, direction Bryce canyon, par une petite route qui serpente dans une vallée verdoyante, à peu de kilomètres du désert pourtant. Le canyon est très beau et nous décidons de faire une petite marche sous le soleil : deux heures de promenade entre les pitons rocheux qui passent de l’ocre au rose – Jeanne et Joseph font excellente figure, partent devant en tong et en nous laissant les bouteilles d’eau. Ils arrivent vaillamment en tête, sous le regard étonné et vaguement inquiet de quelques familles qui les croient perdus !

Nous reprenons encore la route en traversant l’Utah (Mike nous avait prévenu : en Utah, mieux vaut acheter sa bière avant d’entrer dans l’Etat, mais en revanche on peut se marier trois ou quatre fois, en même temps !) – les paysages sont magnifiques, il y a d’autres canyons méconnus mais immenses, sous un ciel orageux c’est grandiose, et nous arrivons le lendemain à Salida (prononcer « Selyda »), Colorado, où nous attendent donc Mike, Trish et Chettie leur adorable chienne. La ville est très jolie, très active malgré ses 5000 habitants, et nous sommes ravis de faire une pause dans la vraie Amérique après avoir traverser la Californie, l’Arizona et l’Utah au pas de course. Et puis c’est formidable de retrouver ces amis très chers croisés à Lima. Leur maison est charmante, nous sommes accueillis comme des rois (nos premiers vrais hamburgers au barbecue avec une Root beer !). Et puis nous sommes le 4 juillet : les américains ont gentiment décidé de tirer des feux d’artifice pour l’anniversaire de Marthe ! Ils n’hésitent devant rien !

Le lendemain, balade à vélo dans la ville, visite de la ferme de truites pour les enfants, Eléonore et Trish pendant que Mike m’aide à réparer (ou plutôt que je l’aide à réparer…) la fenêtre avant du camping-car : un matin en Baja California, nous avons oublié de la fermer, elle s’est envolée sous la pression du vent et nous n’avons même pas songé à nous arrêter en entendant le « boum » de son explosion… Nous construisons donc une fermeture blindée en bois et en métal, grâce à l’aide de la petite entreprise que Mike possédait et qu’il avait vendue avant de partir en voyage il y a deux ans. Le résultat est spectaculaire : si les dockers ou les marins veulent vraiment entrer dans le camping car pendant le transport du mois d’août, ils passeront clairement par ailleurs ! On en profite aussi pour visiter l’armurerie du coin, tenue par des évangélistes-chrétiens « pro life » ultra républicains, qui détestent Obama… c’est édifiant… Mike rigole en les provoquant : c’est sûr que c’est à Salida qu’il y a le plus de délinquance (personne ne songe à fermer sa maison ni à attacher son vélo). Nous quittons Salida le lendemain, tristes de laisser Mike et Trish, mais contre moultes promesses de visites réciproques, toujours vers l’est.

En deux journées (longues), nous rejoignons les faubourgs de Chicago. Heureusement, nous faisons du latin Marthe et moi, pour rattraper un an et demi de cours en deux mois !

Nous arrivons donc près de Chicago et nous décidons de camper pour ne pas arriver en ville à la nuit – bien nous en prend car nous apprendrons ensuite que les Wall Mart du centre ville n’acceptent pas les camping-car. Au camping, incroyable coïncidence : nous stationnons à côté de Gérard et Jacqueline, un couple de français retraités, anciens de la Martinique, super sympas, qui voyagent maintenant aux USA avec leur grand « trailer » et leur pick-up, et qui avaient rencontré Manu et Laure il y a 2 ans près de Salt Lake City ! Nous passons une soirée bien arrosée à nous raconter avec joie nos aventures, pendant que les enfants font griller des marshmallows sur le feu. Le lendemain (vendredi dernier 8 juillet), nous arrivons à Chicago.

On stage !
Comme il ya 20 ans, nous tombons immédiatement sous le charme de cette mégalopole à taille humaine, de ce skyline extraordinaire, de son énergie, de ses parcs, de son architecture, de son chic. On ne restera que 24 heures, juste le temps de redécouvrir la ville. Nous commençons par une promenade sur le Magnificent mile puis dans le parc du Millenium où une sculpture métallique réfléchissante et déformante nous enchante et où un concert classique en plein air attire des milliers de personnes. En fin de journée, soirée « Blues » au Kinstone Mines, le bar de blues où il faut aller et où Joseph se fait kidnapper par le guitariste-chanteur, Eric Davis, qui l’emmène sur la scène pour le faire jouer avec lui devant un public conquis, suivi d’une nuit dans une allée où nous croisons un coyote puis une bande de 200 joyeux étudiants qui font une virée en mobylette. Le lendemain, promenade à vélo le long des berges du lac Michigan et déjeuner panoramique au 95ème étage de la Hancock Tower ! Waouh ! On retournerait vivre à Chicago sans la moindre hésitation (en tout cas l’été !).

Et puis voilà, nouvelle route de deux jours à travers l’Illinois, l‘Indiana, l’Ohio et la Pennsylvanie pour arriver chez Jim, le frère de Mike, dans le New Jersey, où nous allons laisser le camping-car pendant notre séjour à New York et en attendant son embarquement. L’accueil de Jim est super, il nous prépare un curry indien pendant que nous rangeons et vidons le camping car, avant notre dernière nuit à bord… Snif, le voyage est fini, nous versons une petite larme en laissant Eliott derrière nous pour aller chercher Martine et Roger qui arrivent avec Domitille, la grande copine de Marthe, pour une séjour New Yorkais qui s’annonce bien rempli !