jeudi 26 mai 2011

Un vrai festival...


Comme nous le laissions entendre dans le précédent article, la tentation de fondre sur l'artisanat local était grande, et nous n’avons pas résisté 40 jours : nous voilà à San Cristobal de las Casas, au Chiapas, et nous passons d’échoppes en marchés, l’artisanat mexicain est absolument inimaginable de richesse, de couleurs, de créativité, d’humour aussi - les crânes et squelettes décorés et mis en scène sont omniprésents, avec un décalage ironique très amusant.

Nous avons donc laissé la péninsule du Yucatan derrière nous après une halte reposante au bord de la mer turquoise – première expérience familiale de snorkeling dans une mer un peu agitée, mais tout le monde résiste vaillamment, malgré un masque récalcitrant pour Eléonore, et le spectacle est plein de couleurs, avec des poissons extraordinaires – on se croirait en plein Nemo, même si le guide avait un peu survendu la chose en nous évoquant des tortues. Ceci dit, alors que j’envisageais de me baigner à la nuit tombée, les pêcheurs m’en ont dissuadé : la veille, une raie manta avait piqué un jeune garçon, à quelques mètres de la plage !

Nous sommes donc repartis vers le sud puis l’est, en contournant Belize et Guatemala pour rejoindre le Chiapas. Petite halte le long d’une lagune, Bakalar, d’un bleu aussi turquoise que la mer, et nous atteignons la frontière du Chiapas et l’entrée de la route pour les ruines de Calakmul. Nous ferons l’impasse, malgré la tentation de voir les pointes des pyramides surgir de la jungle, mais nous faisons une petite visite à celles de Becàn, sur la route. Encore une fois nous sommes seuls, mais nous nous surprenons à jouer un peu les blasés… Le lendemain en revanche, dimanche dernier 22 mai, nouveau choc esthétique à Palenque – le choc est aussi thermique, nous avons trouvé plus amusant de faire la visite à 14h, il fait plus de 40°C ! Cette fois, pas de guide, et c’est une erreur car le site est très bien conservé et complet, et nous semble plus « vivant » - aussi nous nous infiltrons dans un groupe de français en voyage organisé qui nous accueille gentiment. Heureusement, le camping que nous rejoignons ensuite (il n’est pas question de dormir dans la nature au Chiapas) bénéficie d’une piscine (chauffée…) où les enfants enchainent les pirouettes. Le site est tranquille, semble-t-il, et nous observons avec émotion des centaines de lucioles qui clignotent dans le crépuscule lorsque soudain il nous semble qu’une famille de jaguars nous attaque ! C’est une bande de singes hurleurs, avec bébés craquants et patriarche imposant, qui se promène au dessus de nos têtes – ils sont timides mais très bruyants et leurs cris nous accompagneront toute la nuit !

Nous repartons pour une petite route de 200 km vers San Cristobal de las casas, vers le sud, à mi chemin du Pacifique – on se croirait revenus en Colombie : 6h pour les 200 km – la première partie tournicote, soit, nous prenons notre mal en patience en nous arrêtant déjeuner près des cascades d’Agua Azul (très bien nommées), avec baignade à l’appui mais lorsque la route redevient un peu plus droite, ce sont les "topes" qui prennent le relais ! Les sud-américains aiment bien mettre des ralentisseurs à l’entrée des villages, mais les mexicains ont élevé le gendarme couché au rang de religion ! Il y en a à l’entrée, au milieu, à la sortie de chaque hameau – parfois même au milieu de nulle part, parfois signalés, parfois pas du tout, et souvent hauts comme des trottoirs ! Et quand ce n’est pas un vibreur (plutôt un massacreur d’amortisseurs), ce sont les gamins des villages qui tendent un fil en travers de la route pour essayer de vendre qui un épi de maïs, qui une mangue – ils sont charmants, mais seulement les trois premiers !

Nous voilà donc à San Cristobal de las casas, fief de l’EZLN, l’armée rebelle dont le sous-commandant Marcos est le héraut. On n’a pas senti sur les routes du Chiapas de tension particulière, il semble que la guérilla ait perdu de son influence, mais il y a quand même une présence militaire importante. Et à San Cristobal, la prose révolutionnaire s'affiche en toute quiétude – on se demande si ce n’est pas devenu un attrait touristique pour la région… La ville n’a pourtant nul besoin d’une telle publicité car elle se suffit amplement à elle-même : coloniale, colorée, entourée de villages indiens et donc (très) riche d’artisanat… Nous visitons une maison-musée d’un couple d’ethnologues-photographes-archéologues, passant de patio en patio à regarder les vieilles photos et les objets traditionnels des communautés indigènes. Les enfants adorent, peut être à cause des tortillas et du guacamole ! Presque par hasard, en tout cas juste parce que c’était sur le chemin, nous nous arrêtons dans un atelier de fabrication de papier (soit à base de carton recyclé, soit à base de fibres des arbres et arbustes de la région) – c’est une activité communautaire, coopérative de femmes indigènes et le résultat est magnifique de couleurs et de matières. La production ne s’arrête pas au papier, car l’atelier est aussi une maison d’édition d’œuvres picturales et poétiques – après Tecolote à Mexico, c’est un joli clin d’œil. Nous avons droit à une visite guidée de l’atelier, avec explication de tout le processus, de la récolte de cartons, de feuilles et de fleurs jusqu’à la presse et au séchage – il y a même un vélo-malaxeur dont le pédalier permet de broyer la pulpe des plantes, sur lequel Marthe fait des prouesses. On suit une équipe sérigraphiant des mains argentées sur du papier brun, c’est magnifique.

Et puis nous filons vers le village tout proche de San Juan Chamula : c’est une communauté qui a élaboré une religion très syncrétique entre les anciennes croyances et rituels mayas et le catholicisme – le résultat est surprenant, et très beau. L’église toute blanche, arbore des décorations multicolores de fleurs et d’étoiles, symbolisant le soleil et la nature. Mais la vraie surprise est à l’intérieur : pas de siège, un sol entièrement recouvert d’épines de pin fraiches sur lesquelles sont installées les familles, entourées de bougies, apportant leurs offrandes (œufs, poules, bouteilles de coca…), psalmodiant en langue maya. Sur les côtés, tous les saints sont alignés, chacun dans une châsse, prêts à sortir pour une petite procession à la première occasion – on y aperçoit « Jesus mayor », « Jesus menor » (lequel est le bon ? Il y en a un qui arbore de magnifiques dreadlocks, ce doit être lui !) – il y a aussi une Vierge qui doit être la patronne des pharmaciens locaux, car elle est entourée de guirlandes lumineuses clignotantes vertes ! Au dessus de l’autel, c’est Jean Baptiste qui trône, le Christ est relégué sur les côtés – et toute l’église-temple est illuminée de centaines de bougies. Ceci dit, la ferveur des habitants, alors qu’il n’y a pas de cérémonie en cours, force le respect et nous nous faisons tout petits – il est absolument interdit de prendre la moindre photo dans l’église, et fortement recommandé d’éviter de photographier les habitants, au risque de leur voler leur âme, ce qui serait, avouons le, assez déplacé !

Demain, départ vers le Pacifique avec une halte au canon du Sumidero, où nous devons faire une balade en bateau entre deux falaises de 800m et en pleine jungle…

3 commentaires:

  1. coucou!! on est à LA CIOTAT bien sûr rien a voir avec votre superbe périple....
    pas de nouvelles depuis 15 jours ....on s'inquiète car lors de votre dernier récit vous partiez dans la jungle, je ne voudrais pas que vous soyez mangés par des petits hommes!!!! non JE RIGOLE comme dirait Paul notre petit-fils
    bises de nous deux et bon vent pour la suite
    katia et silvano

    la baie de LA CIOTAT est tjrs aussi belle

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  2. I just love this blog, particularly its insights.

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